Enquête « Femmes et sans-abrisme : quelles réalités ? » retour sur les résultats du 1er volet dédié aux SIAO

Le rapport du 1er volet de l’enquête « Femmes et sans-abrisme : quelles réalités ? » a été publié par la Fédération des Acteurs de la Solidarité (FAS). Ce premier volet a interrogé les SIAO. Il s’appuie sur les réponses de 63 des 101 SIAO existants, ainsi que sur un rapport produit par la Délégation aux droits des femmes du Sénat. 

  1. Une féminisation de la précarité 

La restitution de cette enquête et le rapport d’information produit par le Sénat pointent une féminisation de la précarité. 87,5% des SIAO notent une augmentation des femmes à la rue. Entre 2020 et 2024, il y a une augmentation moyenne de 26 % des femmes à la rue sur le territoire national. Ce constat a été et reste partiellement inobservable notamment du fait des « stratégies d’invisibilisation que celles-ci [les femmes sans-abris] adoptent afin de ne pas s’exposer aux violences de la rue » (p.8 rapport Senat). Cette féminisation de la précarité s’inscrit dans une dynamique globale de précarisation, comme le montre le dernier rapport de la Fondation pour les Personnes Défavorisées (ex-FAP), puisque le nombre de personnes à la rue a doublé sur les 20 dernières années. 

Le rapport met en lumière les avancées concernant l’adaptation du parc d’hébergement pour répondre aux spécificités du public féminin. La féminisation de la précarité est prise en compte par 93,5% des SIAO qui disposent de places spécifiquement dédiées aux femmes, bien qu’elles restent insuffisantes au regard du nombre de demandes. En ce qui concerne l’orientation du public féminin vers l’hébergement d’urgence, 89% des SIAO ont instauré des critères de priorisation des publics par manque de places. Les publics identifiés sont les Femmes Victimes de Violences (FVV), puis viennent les Femmes Enceintes ou les Femmes Sortant de Maternité (FE-FSM). À l’inverse, 72% des SIAO n’ont pas établi de critères de priorisation dans l’attribution des places en hébergement d’insertion. Ce chiffre s’explique par le fait que l’attribution des places en insertion est faite après une évaluation sociale. Cette situation implique que les femmes sans-abris dont le profil ne correspond pas à un dispositif spécifique sont davantage susceptibles d’avoir des demandes non pourvues. 

  1. Un focus sur deux publics présentant des vulnérabilités : FE-FSM / FVV 

Le rapport porte sur le sans-abrisme féminin en général, mais propose un focus sur deux publics qui cumulent les vulnérabilités, à savoir les femmes victimes de violences et les femmes enceintes ou sortant de maternité. 

FVV

La totalité des SIAO répondants indique avoir mis en place une trame spécifique lorsqu’une femme victime de violences appelle le 115. La circulaire de 2013 visant à renforcer la coopération entre les préfets de département, les SIAO et les associations spécialisées a permis d’instaurer un protocole afin d’améliorer la prise en charge de ce public dans le secteur de l’hébergement d’urgence. Sur le département du Val-d’Oise, un protocole entre le Service Social Départemental, le Centre national d’Information des Droits des Femmes et des Familles, la Police Nationale, la gendarmerie et le SIAO 95 a été mis en place afin de faciliter la prise en charge des FVV. 85% des SIAO répondants ont mis en place un protocole d’orientation spécifique pour les FVV. Parmi ces derniers, 96% proposent des places dédiées uniquement aux FVV. Cela confirme les avancées dans la prise en charge de ce public, avec la mise en place d’un accompagnement social qui répond aux vulnérabilités propres aux femmes victimes de violences. À titre d’exemple, le SIAO 95 est en lien avec les 3 Lieux d’Ecoute, d’Accueil et d’Orientation (LEAO) du département. Pour plus d’informations sur ces lieux dédiés aux FVV, vous pouvez lire cet article du BI qui traite des LEAO sur le Val-d’Oise. Un protocole entre les associations porteuses des LEAO et le SIAO 95 est en cours de réactualisation. 

Sur les 203 000 places d’hébergement dans le parc généraliste, les places dédiées aux FVV représentent 10 700 places, c’est-à-dire 5,2% du nombre total. Étant donné le sous-dimensionnement face à la demande, les FVV peuvent être orientées vers le parc généraliste et hôtelier. L’hôtel est peu adapté à un public nécessitant une prise en charge sociale, médicale et psychologique renforcée. Un rapport du Haut Conseil à l’Egalité (HCE) entre les femmes et les hommes recommande la création de 10 000 places supplémentaires pour répondre à l’accroissement des demandes. Pour le département du Val-d’Oise, 219 places spécifiques aux FVV existent réparties comme suit : 23 places ALTHO – 83 places CHU – 83 places CHRS et 30 places ALT. Il y avait au 31/12/2024, 783 personnes victimes de violences en attente de proposition, dont 98% sont des femmes. Nous pouvons observer une dynamique similaire au niveau départemental et national, à savoir la création de places spécifiques mais en nombre insuffisants pour répondre à la demande et aux besoins de ce public. 

Le rapport recense 30% des SIAO qui orientent ce public vers du logement adapté. Ce type de logements est peu utilisé pour les FVV pour plusieurs raisons. Les places pour les grandes compositions familiales dont rares, les conditions de mise en sécurité sont insuffisantes et l’accompagnement social proposé est limité. Enfin, les critères d’accès liés aux revenus et au statut administratif de ces femmes excluent une part d’entre elles. L’une des principales difficultés dans la prise en charge de ce public est le passage de l’hébergement d’urgence à l’entrée dans un logement pérenne. Le rapport met en lumière trois éléments qui complexifient le parcours résidentiel des FVV, à savoir une situation administrative complexe, une absence de ressources financières suffisantes et une mobilité contrainte. 

Femmes Enceintes et Femmes Sortant de Maternité 

Partant du constat que les femmes enceintes ou venant d’accoucher rencontrent des difficultés pour obtenir une place en hébergement, la DIHAL a ouvert 1 500 places pour les femmes sortant de maternité dont 10 places sur le Val-d’Oise en fin d’année 2024. Ces nouvelles places s’ajoutent au contingent déjà existant sur le département. En détail, il y a 10 places en pré-maternité pour femmes seules, ainsi que deux places en pré-maternité pour une femme enceinte avec un enfant. Enfin, le département du Val-d’Oise compte également 23 places post-maternité. Ces places répondent à un besoin réel, puisque les femmes accueillies bénéficient d’un accompagnement renforcé autour des questions de périnatalité. Ainsi elles peuvent passer les premiers mois de parentalité à l’abri. À l’échelle nationale, elles sont inéquitablement réparties sur le territoire, puisque 55% des SIAO répondants déclarent avoir des places spécifiques dédiées à ce public contre 45% qui n’en possèdent pas.
Le manque de places spécifiques implique une orientation vers l’hébergement ou le parc hôtelier. Parmi les SIAO ayant des places pour les FE-FSM, aucun ne pratique des sorties sèches. Par exemple, le SIAO 95 est en lien avec les maternités du département dans l’orientation du public féminin post-maternité. Cela permet une mise à l’abri des femmes sortant de maternité pour un mois. Les réorientations sont à 80% d’un hébergement à l’autre et 20% vers un logement (social ou adapté). Les freins identifiés pour l’orientation vers un logement sont les situations administratives précaires et l’absence de ressources financières. 

  1. Préconisations/propositions 

La FAS émet plusieurs propositions pour améliorer la prise en charge du public féminin concerné par le sans-abrisme. Mettre en œuvre une “programmation pluriannuelle de la rue au logement” afin d’accroître le nombre de réorientations et de sorties vers un logement pérenne. La FAS rejoint l’avis du HCE et préconise la création de 10 000 places sur le territoire national, incluant des places non mixtes et adaptées aux besoins spécifiques des femmes et des familles. 

Pour les femmes victimes de violences et pour les femmes enceintes ou sortant de maternité, ils souhaitent que l’État poursuive l’augmentation du nombre de places leur étant dédiées. Enfin, la FAS plaide pour un renforcement des partenariats entre les associations spécialisées du territoire et les SIAO. 

  1. Deuxième volet de l’enquête en cours 

Cette première partie de l’enquête sera complétée par un
second volet dans lequel la FAS mobilisera les accueils de jour et les maraudes qui sont au contact d’un public en partie ou entièrement féminin.

POUR ALLER + LOIN

Téléchargez le rapport de l’enquête « Femmes et sans-abrisme : quelles réalités ? Volet 1 | Le phénomène vu par les SIAO », en cliquant ici.

Retrouvez également :

✔️ Le rapport « Où est l’argent contre les violences faites aux femmes? » de la Fondation des femmes, en cliquant ici ;  

✔️ Le rapport «  Femmes sans abri, la face cachée de la rue » de la délégation aux droits des femmes du Sénat, en cliquant ici.  

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