Journée Nationale de la FAS – Logement d’Abord

Mardi 20 mai 2025 s’est tenue une journée nationale sur le rôle des SIAO et des acteurs de la veille sociale dans la mise en œuvre du logement d’abord, organisée par la FAS (Fédération des Acteurs de la Solidarité). Plusieurs membres du SIAO 95 étaient présents. Mr BRICE, président de la FAS, a ouvert cette journée. Il a d’abord appelé à intensifier la politique du LDA qui a prouvé, par des données chiffrées, sa pertinence en comparaison avec la logique d’escalier qui avait cours avant le LDA, sans en évacuer les limites. Le LDA comporte une dimension locale dans son application et doit garder une souplesse afin de s’adapter aux réalités territoriales. De plus, Mr BRICE constate un impact moins important dans le monde rural, question à laquelle il appelle à réfléchir collectivement pour apporter des réponses qui satisfassent les besoins des personnes accompagnées. Enfin, la FAS a pour projet de lancer un débat sur la question des addictions et la prise en charge de ces personnes pour favoriser leur accession à un logement pérenne. 

Mr D’HARCOURT, délégué interministériel à l’hébergement et à l’accès au logement, a mis en lumière la dimension partenariale du LDA et la place centrale occupée par les SIAO dans son déploiement local. Le rôle des SIAO a été renforcé avec le financement de 500 ETP, ce qui représente 25 millions d’euros de budget. Mr D’HARCOURT est revenu sur les freins à la mise en place du LDA, et notamment les difficultés de recrutement commun à l’ensemble du secteur social, phénomène souligné par plusieurs intervenants.  

Mme LATOUR, directrice générale de la FAS, est intervenue sur le rôle de la FAS dans le déploiement du Logement d’Abord, et son action de mobilisation en soutien des acteurs de terrain. Elle appelle à sécuriser le budget dédié afin de lever les incertitudes et pérenniser les dispositifs qui ont prouvé leur efficience. La FAS a un rôle d’animation du réseau professionnel, afin de diffuser les bonnes pratiques et innovations pour répondre aux enjeux que posent la crise du logement et l’engorgement des structures de l’AHI. Enfin, Mme LATOUR a plaidé pour renforcer la diffusion des travaux menés par les observatoires sociaux, qui démontre de manière chiffrée l’efficacité du LDA.  

Mr ROUTIER, administrateur à la fédération Nationale des Samu Sociaux, a mis l’accent sur les problématiques rencontrées par les acteurs de la veille sociale. Il a ainsi alerté sur l’ampleur de la crise du logement et de l’hébergement, le taux de pauvreté croissant, ainsi que l’augmentation du nombre de personnes mortes de la rue. Ces éléments ont des implications fortes sur les publics accompagnés, mais également sur les travailleurs de la veille sociale. Il a identifié de nombreux cas de souffrance au travail parmi les équipes de maraudes du fait de la dégradation des conditions de vie des personnes rencontrées et de la mise en concurrence des publics par l’absence de solutions.  

Mme BUCHERON, personne dite “concernée”, est intervenue sur les difficultés rencontrées par le SIAO de la Nièvre, dont est membre du Conseil d’administration. La Nièvre est un territoire rural, dans lequel le SIAO observe une augmentation des personnes en demande d’hébergement. Cela concerne particulièrement les jeunes, les femmes avec enfants et les femmes isolées. Ce territoire manque de transports publics, ce qui constitue un élément bloquant pour l’orientation des personnes et un facteur d’isolement.  

Enfin, Mme HERBAGE, présidente du GAN, est revenue sur les difficultés rencontrées par les SIAO dans la mise en œuvre du LDA. Elle note une stabilisation du budget pour le second volet du LDA, alors que les missions et le rôle du SIAO ont été renforcés. La mise en concurrence des publics avec l’introduction de critères de priorisation et l’augmentation du nombre de demandes non pourvues engendrent des risques psycho-sociaux pour les écoutants du 115. 

La seconde partie de cette table-ronde portait sur les leviers d’action et les préconisations.  

Plusieurs pistes de travail ont émané des échanges nourris : 

  • Le décloisonnement et la coopération entre les acteurs qui portent le LDA, notamment entre les secteurs sociaux, médico-sociaux et médicaux. 
  • Le renforcement de la production de logements à très bas loyers et de l’offre de places d’hébergement sans que celles-ci ne se substituent à l’augmentation du nombre de logements. 
  • L’important de faire évoluer les règles des CALEOL en priorisant le public sans-abri dans l’attribution des logements sociaux. 
  • La nécessité d’un plan structurel afin que les principes du LDA infusent l’ensemble des politiques publiques. A titre d’exemple, le renforcement des critères pour accéder à une régularisation complexifie le parcours locatif de ce public. 
  • La pérennisation des expérimentations fonctionnelles sur le territoire en sécurisant le budget via des plans pluriannuels. 
  • Le renforcement des efforts en vue de maintenir à domicile des personnes en difficulté. 

Pour conclure cette discussion, Mr D’HARCOURT a présenté les axes de travail de la DIHAL. Il souhaite engager une réflexion autour de la durée de validité des demandes d’hébergement au 115. De plus, la DIHAL vise une amélioration progressive du SI-SIAO afin d’en faire un outil unique dans le suivi du parcours des personnes. 

 

La seconde table-ronde avait pour thème : Le partenariat et la coordination entre les acteurs au service du Logement d’Abord. Elle réunissait Mr MORIVAL, directeur du pôle Accueil de l’association ABEJ SOLIDARITE, Mme PIERRE et Mme BUAN, respectivement cheffe de service Insertion et cheffe de service Urgence au SIAO 27 (Eure). Ainsi que Mr SOUMARE, travailleur pair dans un accueil de jour pour l’association AURORE et Mme MAZEAU, Coordinatrice du Logement d’Abord pour la métropole du Grand Nancy. 

La présence de Mr SOUMARE, travailleur pair dans un accueil de jour pour l’association AURORE, a permis d’exposer la pertinence d’avoir un tel professionnel dans les structures accueillant le public. Les travailleurs pairs assurent un rôle essentiel dans la création de lien entre travailleurs sociaux et personnes accompagnées. Se situant à mi-distance, il a insisté sur la nécessaire déconstruction des représentations des personnes accompagnées vis-à-vis des travailleurs sociaux et inversement, comme prérequis à la mise en place d’un accompagnement social. Ce rôle comporte une forte dimension partenariale au sens où les travailleurs pairs représentent une interface entre les acteurs de la veille sociale et le public. Mme PIERRE et Mme BUAN se sont appuyées sur un exemple de personne accompagnée dans le département de l’Eure, afin de faire ressortir les besoins de terrain en termes de coordination et de travail partenarial dans l’accompagnement vers le logement. Mme BUAN a présenté le cas d’une personne à la rue, à la suite d’une procédure d’expulsion. Elle avait des dettes importantes et ne pouvait plus solliciter les bailleurs sociaux du fait des impayés passés. Une instance partenariale a permis d’agir collectivement afin de lui proposer une place en CHRS hors-les-murs, en adéquation avec ses contraintes, à savoir la présence d’un animal, le refus d’un accompagnement social lourd et un manque d’autonomie dans le logement. Mme BUAN a souligné la souplesse et la dimension collective du LDA, qui a permis de trouver une solution de sortie positive.  

Mme MAZEAU, coordinatrice du Logement d’Abord pour la métropole du Grand Nancy, est revenue sur les outils élaborés pour mettre en place un travail partenarial dans le cadre du LDA. Premièrement, des instances de coordination qui favorisent l’interconnaissance et le décloisonnement, notamment avec les bailleurs sociaux qui peuvent se montrer réticents à l’idée de loger à des personnes en situation de grande précarité. Deuxièmement, la complexité des dispositifs constitue un frein à l’accès aux droits des personnes et nécessite une clarification. Dernièrement, la prévention des expulsions locatives a permis d’éviter les ruptures trop importantes pouvant mener à une situation de mal-logement ou de sans-abrisme. Enfin, elle identifie deux éléments qui restent à travailler, à savoir l’allègement des conditions d’entrée sur les dispositifs, notamment pour les grands marginaux, et la mobilisation du parc locatif privé pour faire de l’intermédiation locative.  

Mr MORIVAL, directeur du pôle Accueil de l’association ABEJ SOLIDARITE, a exposé trois pratiques instaurées via les moyens obtenus dans le cadre du LDA, et notamment en tant que territoire accéléré du LDA. D’abord, l’embauche d’une référente LDA pour faire le lien avec les bailleurs et faciliter l’accès au logement des personnes accompagnées. Ensuite, les moyens ont été utilisés pour mener des formations à destination des partenaires. Enfin, il y a eu une modification des pratiques professionnelles des maraudeurs. Initialement, les personnes rencontrées en maraudes étaient orientées vers l’accueil de jour, qui s’occupait à son tour de réorienter la personne afin de les faire accéder à un logement ou un hébergement. Une équipe mobile peut désormais orienter directement les personnes rencontrées sans passer par l’accueil de jour, ce qui accélère l’accession à un logement ou une place d’hébergement. Cela s’inscrit dans une stratégie visant à mettre un terme à la logique de parcours en escalier. 

 

La journée a continué par une présentation de Mr SIMON, responsable de l’unité Solidarité Logement au sein du service Habitat de Rennes-Métropole. Il a évoqué les actions et dispositifs pour favoriser l’inconditionnalité de l’hébergement sur le territoire de Rennes-Métropole. Trois actions ont été mises en œuvre afin de proposer une solution d’hébergement ou de logements pour les ménages prioritaires en attente d’une proposition de logement, les ménages à droits incomplets, les femmes victimes de violence, les sortants d’ASE ou les grands marginaux :  

  • L’achat de bâtiments transitoires, pour héberger les publics en attente d’un logement social et qui nécessitent un accompagnement. Ces ménages sont logés temporairement avec l’objectif de démarrer un accompagnement avant l’entrée dans le logement pour favoriser leur maintien au sein de ceux-ci dans le futur.  
  • L’occupation de bâtiments en attente de réhabilitation ou de démolition pour rendre les logements salubres. Cela représente un investissement important pour la Ville mais est financé a posteriori par le versement des loyers des occupants. 
  • L’achat de foncier en attente d’aménagement. Il s’agit ici de développer des logements modulaires donc adaptables aux personnes accueillies et facilement transportables. 

 

La journée s’est achevée par la participation des membres du SIAO 95 présents à deux des cinq ateliers proposés. L’un des deux ateliers proposait de revenir sur la féminisation du sans-abrisme avec la présentation de l’enquête menée par la FAS sur cette thématique (Enquête Femmes et sans abrisme, volet 2) et une présentation de deux dispositifs.  

Mélanie GACHELIN, directrice de l’association Solidarité et Création à Saint-Nazaire, est venue présenter l’accueil de jour et plus particulièrement le public féminin. L’accueil de jour est mixte et n’accepte pas les enfants, ce qui exclut de facto les femmes monoparentales. Mme GACHELIN observe une augmentation de la part des femmes dans son public. Leur état de santé est souvent dégradé et elles vivent dans des environnements violents, que ce soient des femmes victimes ou autrices de violences. Afin de mettre à l’abri les femmes victimes de violences, l’association a lancé un dispositif de mise à l’abri dans des “tiny house” pour une nuitée. Ce sont des habitats modulaires permettant de déplacer le module pour éviter que l’adresse soit connue des auteurs de violences.  

Dans un second temps, Mr MASSON est venu présenter le dispositif porté par l’association Maison de la Jeune Fille – Jane Pannier à Marseille. Cette résidence accueil compte 20 logements et héberge des femmes isolées dans des cas d’exclusion lourde, et dont la situation sociale et psychologique rend impossible à échéance prévisible leur accès à un logement ordinaire. L’accompagnement des résidents nécessite une dimension sociale mais également psychologique, ce qui implique une relation partenariale forte avec les acteurs du champ médical. L’accueil d’un public uniquement féminin implique plusieurs contraintes spécifiques, notamment la question de la sécurité des résidentes. L’association n’a pas les moyens de financer le salaire d’un veilleur de nuit, ce qui est un facteur d’insécurité. 

L’autre atelier, intitulé « Logement d’abord et emploi d’abord : s’adapter aux temporalités et aux projets des personnes rencontrées », a permis de mettre en lumière trois initiatives particulièrement inspirantes. 

La première initiative, portée par le SIAO 72, consiste en la création d’un poste de Chargé d’Insertion Professionnelle au sein de la structure. Son rôle n’est pas de se substituer aux dispositifs de droit commun, mais d’adopter une approche « d’aller vers » : aller à la rencontre des personnes en demande afin de les orienter, selon leurs besoins et leurs aspirations, vers France Travail, la Mission Locale ou encore des chantiers d’insertion.  

La temporalité de l’accompagnement est entièrement adaptée au rythme des bénéficiaires, permettant d’interrompre ou de réactiver le suivi en fonction de leur situation. 
Le seul critère d’accès à ce dispositif est la régularité du droit au séjour permettant de travailler, ainsi que la motivation des personnes à renouer avec l’emploi. 

La deuxième initiative a été présentée par Convergence et Emmaüs Défi, autour du programme « Premières Heures en Chantier ». Ce dispositif, lancé en 2007 par Emmaüs Défi et aujourd’hui géré par Convergence France, vise à accompagner les personnes les plus éloignées de l’emploi pour les réintégrer progressivement dans le monde du travail. 
Sa spécificité : s’adapter aux personnes, et non l’inverse. La reprise d’activité se fait de manière progressive : démarrage sur un temps de 4 heures par semaine, puis passage à 8 heures, 12 heures… jusqu’à atteindre, idéalement, 26 heures hebdomadaires. 
Quelques principes clés encadrent cette démarche : 

  • Recrutement sans prérequis, avec une attention particulière portée aux personnes sans domicile et en grande précarité ; 
  • Progressivité dans la reprise d’un emploi ; 
  • Ancrage du dispositif dans un chantier d’insertion, inscrit dans un projet social plus large. 

Ce programme est destiné aux professionnels de la veille sociale, notamment les maraudes, qui orientent les bénéficiaires vers le dispositif et assurent le lien avec le Chargé d’Insertion Professionnel du chantier d’insertion. 
Aucun objectif de productivité n’est fixé : le but est de permettre une transition vers un CDDI classique au sein du chantier d’insertion. 
Cette démarche repose sur une coopération renforcée entre les équipes de la maraude, qui travaillent sur les problématiques d’hébergement et de logement, et le Chargé d’Insertion Professionnel, qui accompagne les personnes sur le versant emploi. 

La troisième initiative concerne le « Projet Coach pour l’accompagnement vers l’emploi » déployé depuis 2020. Cette démarche, portée par Trajet (hébergement, logement accompagné, insertion, formation) en partenariat avec L’Étape Insertion (hébergement et accompagnement vers le logement) et La Parenthèse (CHRS du CCAS de Nantes), repose sur une approche intégrée. 
Lorsqu’une personne accueillie dans l’une de ces trois structures exprime un souhait de travailler, elle est orientée vers la Job Coach pour un entretien vocationnel, en présence de son travailleur social référent. Cet échange aboutit à l’élaboration d’un plan d’action, avec un accompagnement dans la durée, sans limite de temps, que ce soit pour la recherche ou pour le maintien dans l’emploi. 

Ces trois initiatives témoignent d’un rapprochement concret entre les secteurs de l’IAE et de l’AHI, permettant la co-construction de parcours d’insertion en articulation avec le SIAO. 
Elles illustrent un véritable changement de paradigme : la prise en charge ne repose plus sur des prérequis ou des critères restrictifs, mais sur la seule volonté des personnes de reprendre une activité professionnelle. C’est cette envie qui initie le parcours, soutenue ensuite par la Job Coach, le chargé d’Insertion Professionnelle et les travailleurs sociaux jusqu’à l’obtention d’une solution d’emploi adaptée et satisfaisante. 
Cette logique est pleinement cohérente avec la philosophie du Logement d’Abord. 

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