La Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme (CNCDH) a récemment tiré la sonnette d’alarme concernant la crise du logement en France. Dans un avis publié le 28 mars, la CNCDH met en lumière l’urgence pour les pouvoirs publics de mettre en place des dispositifs concrets afin de répondre à un enjeu sociétal majeur : l’accès à un logement digne. En effet, en 2024, 4,1 millions de personnes sont privées de logement ou mal-logées dans le pays.
Dans son précédent avis de 2016, la CNCDH soulignait une aggravation du mal-logement en France, malgré la reconnaissance du droit au logement comme fondamental depuis 1982. Elle pointait des lacunes dans l’offre et la demande, ainsi que des pratiques locales discriminantes. Le nouvel avis se concentre sur le mal-logement, laissant de côté l’hébergement d’urgence. Malgré les nombreuses lois et plans mis en place depuis 2017, la situation persiste, comme le relèvent les interpellations des Nations Unies. La CNCDH rappelle que le logement est un droit fondamental, voire crucial pour l’exercice d’autres droits.
L’avis débute par l’examen de l’offre de logements adéquats et abordables ainsi que l’évaluation de la demande, puis se penche sur les mesures prises et les leviers utilisés pour résoudre le problème du mal-logement. Il aborde ensuite la persistance et l’aggravation de la situation des plus démunis en raison du coût élevé du logement, qui réduit considérablement leur reste à vivre, et de l’insuffisante attribution des logements sociaux aux demandeurs les plus pauvres, malgré le Droit au logement opposable, ces problèmes pouvant être assimilés à une forme de discrimination systémique. Enfin, l’avis propose de nombreuses recommandations visant à renforcer l’effectivité du droit au logement, en conformité avec nos engagements internationaux.
UN ÉTAT DES LIEUX CRITIQUE
Dans cet « Avis pour rendre effectif le droit au logement pour tous », la CNCDH dresse un état des lieux de la situation et des dysfonctionnements en trois volets :
- Insuffisances dans le recueil des données sur le logement : la pertinence de l’action publique est compromise par des lacunes persistantes dans la collecte des données sur le logement.
- Rétrogradation du droit au « logement suffisant » : malgré des leviers d’actions pertinents, le droit au logement régresse, notamment pour les ménages les plus pauvres, y compris dans le logement social.
- Augmentation du taux d’effort des ménages et discrimination systémique : L’insuffisante attribution des logements sociaux abordables aux demandeurs les plus pauvres engendre une discrimination systémique, avec un taux d’effort excessif demandé aux populations les plus modestes.
DES RECOMMANDATIONS POUR RENDRE EFFECTIF LE DROIT AU LOGEMENT
Face à cet état des lieux, la CNCDH formule près de 40 recommandations détaillées pour rendre effectif le droit au logement. Ces recommandations visent notamment à généraliser des mesures telles que l’encadrement des loyers et à renforcer l’accession sociale à la propriété. Cependant, la question des moyens financiers reste un défi, avec une diminution de la part du PIB allouée aux aides au logement après 2010 et des critiques sur la répartition sociale de ces aides.
UN APPEL À L’ACTION
La CNCDH souligne l’importance du logement convenable en tant que droit fondamental, affectant d’autres droits tels que la vie privée, la santé, le travail et l’éducation. Elle déplore les manquements de la France à ce sujet, soulignant les critiques de l’ONU envers le pays. Au terme de cet avis, la CNCDH estime que la politique du logement comporte des aspects de discrimination systémique, excluant du droit au logement décent une partie des personnes dont les revenus sont les plus faibles.
UNE MOBILISATION NÉCESSAIRE
La CNCDH conclut que la politique du logement présente des caractéristiques de discrimination systémique. En dépit de la présence de leviers normatifs pour organiser une solidarité nationale efficace, tels que ceux prévus par les lois SRU, DALO et Égalité et Citoyenneté, plusieurs facteurs contribuent à exclure de facto une partie des personnes aux revenus les plus faibles du droit à un logement décent. Ces facteurs incluent le manque d’évaluation de la cohérence entre les arbitrages budgétaires et la mise en œuvre des normes, la complexité des procédures, les limites des réponses aux besoins d’accompagnement, ainsi que l’absence de contrôles coercitifs en cas de non-application des textes.
Il est désormais crucial que les pouvoirs publics et les acteurs du logement se saisissent de ces recommandations pour apporter des solutions durables à la crise du logement en France. La CNCDH appelle à une mobilisation collective afin de garantir à chacun l’accès à un logement digne, en accord avec les principes fondamentaux des droits de l’homme.
POUR ALLER + LOIN
Téléchargez l’avis « Rendre effectif le Droit au logement pour tous » de la CNCDH, en cliquant ici.